Étude
De l'exclusion à l'inclusion
Le droit fondamental à la formation pour tous les enfants est ancré pour la première fois dans la « Déclaration de Salamanque » de l’UNESCO de 1994. Plusieurs textes internationaux ont ensuite consacré ce droit à l’inclusion pour les personnes handicapées.
Quelques années plus tard, les Nations-Unies ont adopté une Convention relative aux droits des personnes handicapées (CNUDPH) signée et adoptée par l'Union européenne et tous ses États membres. Selon l'article 24, les États parties doivent assurer la réalisation du droit des personnes handicapées à l'éducation par le biais d'un système éducatif inclusif à tous les niveaux, y compris l'enseignement préscolaire, primaire, secondaire et supérieur, la formation professionnelle et l'apprentissage tout au long de la vie, les activités extrascolaires et sociales, et pour tous les étudiant·es, y compris les personnes handicapées, sans discrimination et dans des conditions d'égalité avec les autres. Notre Constitution a également consacré le droit à l’éducation pour tous : « Chacun a droit à l’enseignement dans le respect des libertés et droits fondamentaux».
Pourtant, dans notre enseignement, des élèves sont marginalisés dès leur plus jeune âge dans l’enseignement spécialisé en raison de leurs troubles d’apprentissage ou de leur handicap. Ils sont placés dans des établissements d’enseignement spécialisé et sont isolés des enfants qui ne sont pas en situation de handicap. Ce faisant, le fonctionnement de notre système éducatif n’est pas conforme aux obligations internationales de la Belgique, car il a pour effet de créer deux bulles séparées l’une de l’autre puisque tous les enfants ne vivent pas et ne grandissent pas ensemble. La scolarisation des enfants en situation de handicap se fait actuellement quasi exclusivement en école spécialisée et pour conséquence de les ségréger dans la société.
En créant l’enseignement spécialisé, la Belgique a pu répondre, à un moment donné, aux besoins des parents d’enfants en situation de handicap. Mais, au fil des années, les préoccupations et les demandes des parents – quoiqu’elle restent, évidemment, diverses – ont évolué. Une partie de ceux-ci ne veulent plus que leurs enfants handicapés soient marginalisés dès leur entrée à l’école ou orientés vers l’enseignement spécialisé durant leur scolarisation. De plus en plus de familles souhaitent que leurs enfants puissent fréquenter une école ordinaire pour qu’ils apprennent au contact d’autres élèves qui ne rencontrent pas les mêmes difficultés d’apprentissage.
Chaque enfant en situation de handicap a le droit d’être un élève de l’enseignement ordinaire. Il s’agit du concept de « l’école inclusive » selon lequel c’est à l’école de s’adapter à l’enfant, et non à l’enfant de s’adapter à l’école. Construire une école inclusive implique de réduire au maximum le rôle l’enseignement spécialisé pour qu’il n’existe plus que de manière résiduelle. Pour atteindre l’objectif d’une école inclusive, il faut repenser et réorganiser l’ensemble du système scolaire pour qu’il soit adapté à chaque enfant. De plus, chaque enfant, handicapé ou non, est susceptible d’avoir des besoins spécifiques au cours de sa scolarité.
La Fédération Wallonie-Bruxelles a récemment adopté le Pacte pour un enseignement d’excellence. Ce dernier prévoit « le principe d’une démarche évolutive doit être à la base de l’organisation de l’école inclusive en Fédération Wallonie Bruxelles depuis l’enseignement maternel et jusqu’à la fin de la scolarité de l’enfant, en confirmant le droit de chaque élève d’être inscrit dans l’enseignement ordinaire, sans possibilité de refus d’inscription au motif que l’école nécessiterait des aménagements raisonnables ou que l’enfant ne serait pas capable d’assimiler la matière enseignée. L’école inclusive est définie en Fédération Wallonie Bruxelles comme « permettant à un élève à besoins spécifiques de poursuivre sa scolarité dans l’enseignement ordinaire moyennant la mise en place d’aménagements raisonnables d’ordre matériel, pédagogique et/ou organisationnel ».
Le début de la mise en oeuvre du Pacte a conduit à la suppression de l’intégration temporaire totale des enfants ayant des besoins spécifiques dans l’enseignement ordinaire pour la rentrée scolaire 2020-2021. La mise en place de pôles territoriaux aurait dû commencer au même moment, mais a été reportée d’une année, ce qui a pour conséquence de laisser un vide et de l’incertitude pour les familles.
Quelle est la situation actuelle en Fédération Wallonie-Bruxelles ? Quelle est la différence entre l’intégration et l’inclusion ? Comment d’autres pays mettent-ils en œuvre cette école inclusive ? Le Pacte pour un enseignement d’excellence va-t-il assez loin pour garantir une scolarité ordinaire pour tous les enfants ? Quelles sont les mesures prévues par le Pacte ? Quel est l’avenir de l’enseignement spécialisé ?
L’objectif de cette étude est de répondre à toutes ces questions importantes pour l’avenir de notre enseignement. Elle va également s’intéresser aux moyens qu’il faut mettre en œuvre pour transformer notre enseignement ségrégé en réel enseignement inclusif. Pour ce faire, la Ligue des familles a dégagé un calendrier des mesures à court terme, à moyen terme et à long terme à mettre en œuvre pour prendre le chemin d’une école pour toutes et tous.