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Babysitting et handicap : trop de parents en mode survie

Les parents qui nous contactent sont souvent en mode survie. Nos premiers échanges peuvent être costauds émotionnellement. Ils nous disent « Trouvez-moi une solution, je vais craquer ». Forcément, ça donne envie de se donner à fond et chaque réussite est une fierté… même si ça ne marche pas à tous les coups.
Aurore Bagno

Chargée de projet babysitting

Aurore Bagno travaille à la Ligue des familles dans l’équipe babysitting. Un projet lui tient particulièrement à cœur : le « Babysitting pour tous », qui vise à offrir une solution de garde pour les parents d’enfants en situation de handicap. Nous avons voulu en savoir plus sur ce projet.

Comment est née l’idée d’un service de babysitting inclusif ?

Plus encore que les autres, les parents d’un enfant en situation de handicap ont besoin de pouvoir souffler ou de s’absenter… et plus encore que les autres, ils rencontrent des obstacles pour le faire. Nous nous sommes penché sur la question avec les services de répit et on a constaté qu’il y avait un gros manque de solution pour les absences brèves : faire les courses, aller chez le médecin, faire la soudure entre le retour du bus scolaire et le retour du boulot… Je me rappelle par exemple cette rencontre avec une maman qui expliquait devoir se rendre à plusieurs reprises au tribunal. Le lieu n’est pas autorisé aux moins de 12 ans, sans exception pour les enfants handicapés. Elle était totalement coincée. La Ligue des familles se devait d’apporter un soutien à ces parents.

Quels sont leurs besoins particuliers ?

Il y avait cette nécessité de pouvoir répondre aux absences courtes. Nous avons donc choisi de ne pas imposer de durée minimale aux gardes. La sécurité est également une priorité, les parents étaient les premiers demandeurs d’un cadre bien délimité pour éviter les risques. Un exemple simple : un babysitter ne peut pas être amené à accomplir des actes médicaux.

Je veux aussi noter une autre demande forte : les services de répit se concentrent exclusivement sur l’enfant en situation de handicap – imposant du coup aux parents de trouver une 2e solution pour les autres enfants. Notre service devait offrir une solution globale pour l’ensemble de la fratrie.

C’est vrai, les éventuels frères et sœurs sont là aussi. Ce n’est sans doute pas à eux qu’on pense en premier…

Ils ont une place tout à fait particulière, il fallait y être très attentif. Bien souvent, ils ont une grande maturité et connaissent bien les besoins de leur frère ou sœur en situation de handicap. Ils les comprennent mieux que quiconque, parfois même mieux que les parents. Ils peuvent donc être d’une grande aide et faciliter la garde. Mais dans le même temps, les moments de babysitting doivent être pour eux aussi l’occasion de passer un bon moment et d’être « juste » des enfants.

Quand est né le projet ?

Nous avons ouvert le « Babysitting pour tous » en septembre 2015. On avait beaucoup travaillé au préalable, avec l’appui d’associations actives dans le secteur. Je me souviens, ma collègue Dominique avait attendu mon retour de congé de maternité pour l’ouvrir, sachant que ce projet me tenait à cœur.

Profiter du service ou devenir babysitter ? Voici comment nous contacter.

En pratique, qu’est-ce qu’il y a de spécial par rapport au babysitting « standard » de la Ligue des familles ?

Au niveau des babysitters, la différence est évidente : ce sont des personnes qui ont manifesté l’envie de s’impliquer dans la garde d’enfants en situation de handicap. Ils bénéficient de formations spécifiques et on évalue – selon leur expérience et leur formation – quels types de handicaps et de situations ils pourront prendre en charge.

Pour les parents, c’est le contact personnel et l’échange qui priment. Leurs demandes ne passent donc pas par notre application « HappySitting ». Au premier contact, nous fixons avec les parents demandeurs un entretien téléphonique de 30 à 45 minutes pour collecter toute l’information qui permettra que les gardes se passent bien.

Une dernière différence majeure, c’est le fait que le service est subsidié. S’il faut être membre de la Ligue des familles pour utiliser HappySitting, les aides offertes par l’Aviq et Phare nous permettent d’offrir à tous les parents d’un enfant handicapé l’accès au service. Il ne leur reste donc qu’à rétribuer le babysitter pour son travail.

Ca doit être très gratifiant de savoir qu’on apporte une aide si précieuse !

Oui ! … et non. Malgré les efforts, on ne trouve pas toujours une solution permettant de résoudre la difficulté des parents. Ça, c’est dur… Par exemple, il y a souvent des besoins de gardes récurrentes. Et là, on atteint vite la limite du service. Trouver un babysitter qui pourra récupérer l’enfant à la sortie du bus scolaire à 15h plusieurs jours chaque semaine, c’est très compliqué. Au final, par rapport à la demande initiale des parents, on arrive sans doute à 30% de réussite. Ca fait autant de victoires, mais on aimerait faire encore bien mieux.

Pour clôturer, quel est ton souvenir marquant ?

Il y en a beaucoup ! Je pense à cette babysitteuse qui avait appris la langue des signes parce qu’aux scouts, un des autres animés était malentendant. Elle s’était lancée dans des cours du soir pour pouvoir communiquer avec lui, ce qui l’a conduite à devenir babysitteuse dans le service.

On a aussi eu cette demande impossible : des parents qui devaient en dernière minute partir pour toute la durée des vacances de Noël. Petit miracle : on a trouvé une jeune fille super qui a accepté d’aller habiter chez eux durant toute la durée de l’absence des parents.

Mais en fait, logiquement, on voit mieux les échecs que les réussites. Quand un babysitter est trouvé, la relation se poursuit sans nous, on n’en sait rien. Et c’est parfois des mois ou des années plus tard que le parent nous recontacte et nous dit « Vous pourriez me trouver quelqu’un ? J’avais une super babysitteuse, mais elle a maintenant un enfant, elle n’est plus disponible. » Et c’est ainsi qu’on découvre que les parents avaient profité d’une solution durant tout ce temps. Ces victoires discrètes font un bien fou ! Et elles donnent envie de former encore plein de babysitters pour que ces histoires se multiplient.

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