Analyses et études
Comparatif des tarifs pratiqués dans les 281 communes wallonnes et bruxelloises
A quelques jours des élections communales, la Ligue des familles a analysé les tarifs pratiqués par les 281 communes wallonnes et bruxelloises pour les démarches administratives dont les familles ont souvent besoin : documents d’identité, célébration d’un mariage, cohabitation légale, extraits d’actes d’état civil, autorisation parentale de partir à l’étranger pour un enfant, etc. Elle s’est également penchée sur les horaires d’ouverture des guichets. Les tarifs repris dans cette étude sont ceux qui ont été fournis par les communes entre juin et septembre 2024, soit sur leurs sites internet, soit par e-mail ou téléphone en réponse aux demandes de la Ligue des familles.
La Ligue des familles a identifié plusieurs tendances et formulé des recommandations pour s'assurer d'un accès facile et équitable aux administrations en fonction des démarches à effectuer. Car le choix des tarifs appliqués est un véritable choix politique qui relève exclusivement du pouvoir communal.
Premier constat : la difficulté d’accès à ces tarifs. Une minorité de communes les présentent de manière complète aux citoyens sur leurs sites internet mais dans la plupart des cas, la Ligue des familles a dû contacter l’administration pour obtenir certains voire la totalité des prix pratiqués. A l’heure d’écrire ces lignes, début octobre 2024 soit quatre mois après le début de l’opération, nous n’avons toujours pas obtenu les tarifs de quelques communes qui ne répondent ni par téléphone ni par e-mail.
La cohabitation légale, qui existe depuis un quart de siècle, est absente des sites internet de nombreuses communes, qui parlent du mariage mais ne mentionnent nullement la possibilité de cohabiter, encore moins les démarches à réaliser et leur coût. Renseignements pris, elle est le plus souvent gratuite et, quand elle est payante, moins chère que le mariage – elle n’implique pas de célébration, il est vrai. A Bruxelles, c’est dans la commune d’Uccle que cette démarche est la plus chère (60€) et d’autres communes atteignent ou dépassent les 50€, tandis qu’en Wallonie seule Ath atteint ce niveau ; Boussu suit avec 40€.
Plus étonnant peut-être, l’acte purement administratif de rupture d’une cohabitation légale peut coûter cher. Quand les deux partenaires sont d’accord d’y mettre fin, la démarche est gratuite dans une grande majorité de communes mais coûte 47€ à Ganshoren et jusqu’à 50€ à Ixelles, Saint-Gilles et Anderlecht – en Wallonie, seule la Ville d’Ath la facture à ce prix. Une dépense non négligeable quand elle s’ajoute à toutes celles liées à une séparation – déménagement, frais de justice éventuels concernant la garde des enfants, nouvelle garantie locative, etc.
Dans la plupart des communes, les couples ont la possibilité de se marier gratuitement certains jours de la semaine. A Bruxelles, c’est le cas partout sauf à Anderlecht (100€ le jour le moins cher + 60 à 110€ de frais de dossier) et Bruxelles-Ville (50€). Mais les jours où le mariage est payant – ce qui est généralement le cas le samedi –, la célébration peut coûter jusqu’à 692€ à Watermael-Boitsfort, le samedi après-midi – prix le plus élevé des communes étudiées. A Saint-Gilles, Ixelles et Forest, le coût monte jusqu’à 450 à 500€ au moment le plus cher, sans compter certains frais administratifs supplémentaires dans certains cas, tandis qu’il se limite à 50€ à Woluwe-Saint-Pierre.
En Wallonie, dans de nombreuses communes, le mariage est tous les jours gratuit ou coûte au plus quelques dizaines d’euros le samedi. Quelques exceptions tout de même : les prix montent à 328€ à Tubize, 268€ à Florennes, 234€ aux Bons Villers.
Si les différences de coût entre Wallonie et Bruxelles sont souvent importantes, au détriment de la capitale, c’est en ce qui concerne le décès qu’elles se marquent le plus. Nous avons comparé les tarifs des concessions pleine terre dans les cimetières. En Wallonie, pour 30 ans, le coût tourne le plus souvent autour des 300€, bien que cela atteigne 2179€ à Mouscron, 1000€ à Remicourt et 913€ à Farciennes (pour 25 ans dans ce dernier cas). A Bruxelles, où le territoire disponible est certes plus rare, les communes facturent le plus souvent un prix à quatre chiffres pour cette durée, culminant à 4300€ à Anderlecht.
Partout ou presque, ce tarif peut doubler, tripler voire davantage pour les personnes qui n’habitent pas la commune. Relevons en outre que certaines communes sur lesquelles se trouvent des hôpitaux facturent la déclaration de décès uniquement pour les personnes n’habitant pas la commune, décédées à l’hôpital, tandis qu’elle est gratuite pour les résidents.
De nombreuses communes facturent les cartes d’identité au niveau du coût qu’elles doivent rétribuer au SPF Intérieur, qui les produit : 7,70€ pour la carte d’identité enfant et 19,10€ pour la carte d’identité adulte. Mais certaines communes demandent des tarifs bien plus élevés aux familles. En ce qui concerne la Kids-ID, c’est le cas de Braine-l’Alleud (16€), Berloz et Herve (15€), Uccle, Ferrières et Geer (14€). Les cartes d’identité pour les adultes chiffrent parfois bien plus : 36€ à Mouscron, 34€ à Verviers, Oupeye, Soignies et La Calamine. Ganshoren est la seule commune bruxelloise à dépasser, de justesse, les 30€.
Les familles voyageuses font également face à des coûts bien différents selon leur commune de résidence. Les communes facturant les passeports au niveau du prix fixé par le SPF Intérieur (65€ pour un adulte et 35€ pour un enfant) sont minoritaires – citons, positivement, Beauvechain, Daverdisse et Etalle. La plupart prévoient une redevance communale, parfois assez élevée. Le prix d’un passeport adulte atteint ou dépasse les 100€ à Anderlecht, Etterbeek, Ganshoren, Ixelles, Saint-Gilles en Région bruxelloise et à Ath, Anhée et Gedinne en Région wallonne. Quant au passeport enfant, il atteint ou dépasse les 70€ (deux fois le tarif fixé par le SPF Intérieur) à Ath, Anhée, Berchem-Sainte-Agathe, Ganshoren, Ixelles. Tous ces montants concernent la procédure normale – les procédures accélérées étant, logiquement, bien plus chères.
Certaines communes se distinguent par leur volonté manifeste de rendre ces démarches administratives le moins chères possible pour les citoyens. C’est le cas de Cerfontaine, où toutes les démarches que nous avons examinées sont gratuites, y compris le mariage quel que soit le jour et la carte d’identité enfant. Seuls les passeports et la carte d’identité adulte (au coût modique de 19€, soit le prix à rétribuer au SPF Intérieur) y sont payants. À Beauvechain, Mont-Saint-Guibert, Vresse-sur-Semois et Anthisnes, tout est gratuit également sauf les documents d’identité, facturés au prix du SPF Intérieur ou à peine au-delà.
Certaines communes ont pu opter pour d’autres choix politiques et facturer un peu plus chers les passeports, à payer uniquement par les personnes qui voyagent à l’étranger, ou les mariages le samedi après-midi quand ils sont gratuits d’autres jours, pour offrir d’autres services importants que la Ligue des familles ne peut que soutenir : la fourniture du matériel scolaire, l’organisation de trajets vers les activités extrascolaires, la réfection des trottoirs pour qu’ils soient accessibles aux poussettes, etc.
Tout cela est question de choix politiques. L’objectif de la Ligue des familles, avec le présent comparatif, est d’inscrire ces enjeux dans le débat public, comme un point d’attention, parmi d’autres, des familles dans les communes. Et d’alerter les futur·e·s élu·e·s à propos de ces différences entre les tarifs pratiqués dans leur commune et ceux existant ailleurs dont ils n’ont peut-être pas toujours conscience.
Là où il n’y a par contre, pour la Ligue des familles, pas d’arbitrage à effectuer, c’est sur la question de l’accessibilité des informations pour les citoyen·ne·s. Il n’est pas justifiable qu’en 2024, les sites internet des communes ne donnent pas toujours directement accès aux informations relatives aux démarches administratives et ne mentionnent pas tous, clairement et en détail, le coût de chaque document. La Ligue des familles appelle les futur·e·s élu·e·s à s’assurer de la complétude et de la lisibilité du site de leur commune.
Par ailleurs, si la Ligue des familles se réjouit que de plus en plus de démarches puissent être effectuées en ligne, ce qui facilite la vie de nombreux parents, elle attire l’attention sur le caractère problématique de rendre les documents demandés au guichet plus onéreux que ceux téléchargés en ligne et de faire ainsi payer davantage les démarches administratives aux personnes qui subissent la fracture numérique, parmi lesquelles les personnes précarisées sont surreprésentées. Il est indispensable d’aligner les tarifs pratiqués sur place sur ceux pratiqués en ligne et de maintenir de larges horaires d’ouverture des guichets.